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Appareils auditifs pré-réglés : pourquoi les audioprothésistes « tapent-ils » dessus ?

Au cours de nos recherches sur les aides auditives préréglées (que nous comparons aux appareils auditifs sur-mesure ici et que nous comparons entre elles – suite à un test terrain – ), nous sommes tombés sur de nombreux articles dénigrant ce type d’appareil auditif. Cela nous a étonné pour 4 raisons principales :

« Les chiens aboient, la caravane passe »

Les appareils auditifs préréglés étant un produit fabuleux pour plus de 5 millions de français, dont le pouvoir d’achat baisse constamment pendant que leurs cotisations aux mutuelles augmentent, nous avons décidé de reprendre les arguments donnés par les audioprothésistes afin de les analyser objectivement et permettre aux consommateurs d‘être véritablement éclairés dans leurs choix. Nous ne doutons pas que les personnes intéressées feront ensuite le test par elles-mêmes : avant de mettre 3000€ dans un appareillage auditif sur-mesure, n’est-il pas plus sage de commencer par tester celui à 300€ ?

Des titres d’articles faussés, parce qu’après tout, pourquoi pas ? 

Nous nous référons à deux articles rédigés par des acteurs importants sur le marché de l’audition, parce que ces articles résument assez bien ce que nous avons retrouvé (un peu partout) ailleurs :

La première chose qui nous étonne dans ces titres est le souci de ne souligner que les différences entre ces deux types d’appareils auditifs alors qu’il y a davantage de points communs que de différences entre elles ! Nous en parlions en détail précédemment (ici), les points communs entre ces types d’appareils auditifs sont nombreux :

Faire l’impasse sur ces points communs, c’est éviter aux consommateurs de se poser la question qui en découle : pourquoi, alors, la différence de prix entre ces deux appareils auditifs est-elle aussi importante ? Et c’est dommage car la question est bonne et sa réponse permet d’appréhender la seule différence entre ces deux types d’appareillages auditifs : la perte auditive à laquelle ils se destinent.

=> L’appareillage auditif sur-mesure

Il s’adresse aux véritables handicaps auditifs, c’est à dire aux personnes pour lesquelles, sans appareillage, la socialisation n’est pas possible. Il s’agit de 6% de la population de malentendants et 90% de ces personnes sont appareillées. Ces personnes sont appareillées très tôt, afin de pouvoir vivre normalement. Une partie d’entre elles parlent également la LSF (Langue des Signes Française). La prise en charge des handicaps auditifs est excellente.

L’appareillage auditif sur-mesure implique un parcours long et réglementé :

Ces personnes n’ont le choix :

En conséquence, l’appareil auditif sur-mesure ne peut (et ne doit) être délivré que par un audioprothésiste, sur prescription médicale d’un ORL. Le choix de l’appareil, le suivi et l’ajustement demandent un savoir-faire et du temps qui justifient un prix haut.

=> L’appareillage auditif préréglé

Il s’adresse exclusivement aux personnes dites presbyacousiques, c’est à dire celles qui ressentent, avec le temps, une gêne auditive naturelle, liée au vieillissement du système auditif. Ces personnes sont au nombre de 5 millions en France. La presbyacousie représente 88% des troubles auditifs actuels et 95% des indications d’appareillage des médecins ORL. Conséquence de notre monde moderne bruyant, la presbyacousie se manifeste plus précocement et touche de plus en plus de personnes.

3 presbyacousiques sur 4 refusent, aujourd’hui, l’appareillage auditif sur-mesure car, n’étant pas en situation de handicap, ils rejettent une offre pensée pour des pathologies lourdes (l’excellente prise en charge en moins) :

En somme, pour les presbyacousiques, la différence entre le préréglé et le sur-mesure c’est comme si vous vous étiez fait une entorse et que l’on vous proposait un déambulateur au lieu d’une atèle adaptée.

Il y sur le marché de l’audition, des intérêts opposés qui doivent être compris par les consommateurs car cela permet de mieux comprendre les enjeux des uns et des autres.

D’un côté, les intérêts de 5 millions de français qui ont compris intuitivement que leur gêne n’est pas un handicap et refusent de s’appareiller avec une offre qui ne leur correspond pas. Pour ces personnes, un appareillage discret, efficace, prêt à l’emploi et vendu sans ordonnance est la solution parfaite, rapide et abordable. Nous comprenons ainsi que l’avis des utilisateurs d’aides auditives préréglées soit élogieux.

De l’autre, les intérêts des grands groupes de prothèses auditives qui ont des charges colossales à amortir (salaires, frais de publicité et marketing, charges des boutiques dont le nombre dépend d’une stratégie de proximité : chaque cabinet ORL à, face à lui, une boutique d’audioprothésistes) et un savoir-faire destiné à une minorité de personnes, dont la majorité est déjà appareillée. Ainsi, au lieu d’adapter une partie de l’offre à la demande de millions de français, les audioprothésistes ont uniformisé leurs prix (vers le haut), négocié une meilleure prise en charge (quoique) et dénigrent les nouveaux entrants, qui leur font, forcément, du tort.

L’argument principal : la distinction des appellations 

La plupart des arguments contre les prothèses auditives préréglées se basent sur la distinction des appellations, comme si définir un amplificateur de sons « prothèse auditive » ou « assistant d’écoute » était garant de sa performance (et, surtout, de la satisfaction de l’utilisateur, ce qui est bien le principal objectif). Ce qui est regrettable reste que ces arguments (qui n’en sont pas), sont en parfaite contradiction avec ce que dit la Loi, puisque cette dernière autorise toutes les appellations. Et, d’autre part, que cette confusion n’est entretenue que par les audioprothésistes eux-mêmes !

Quelques exemples issus des articles précédemment cités :

• Audika « Bien que les assistants d’écoute amplifient les sons environnants, il faut rester vigilant car ce ne sont pas des aides auditives. (…) Les fabricants de ces derniers souhaitent d’ailleurs maintenir la confusion à travers leur publicité en nommant les assistants d’écoute « appareil auditifs »

Unisson : « Un assistant d’écoute n’est pas un appareil auditif. (…) Certaines marques comme Sonalto n’hésite pas à utiliser des termes appartenant au domaine de l’audioprothèse pour vanter les mérites de leur amplificateur auditif. Ainsi, certains n’hésitent pas à parler « d’aide auditive » voire même « d’appareil auditif » ce qui crée une certaine confusion dans l’esprit des malentendants qui souhaitent s’équiper »

Pour plus de clarté dans l’esprit du lecteur, revenons-en aux fondamentaux : que dit la Loi ?

L’Agence Nationale de Sécurité du Médicament et des produits de Santé (ANSM), précise très clairement que les termes comme « assistant d’écoute », « assistant auditif », « prothèse auditive externe », « sonotone » qui ne décrivent pas la destination du produit, n’interfèrent pas dans son statut réglementaire. Ainsi, contrairement à ce que suggère nos audioprothésistes :

Les assistants d’écoute sont donc bel et bien des aides auditives, des prothèses auditives ou des appareils auditifs, appelez-les comme vous le souhaitez. Nous ajoutons qu’au regard de la très mauvaise presse des appareils auditifs sur-mesure, il serait peut-être plus judicieux de trouver une autre appellation pour les produits préréglés qui, eux, jouissent d’une excellente réputation !

Un autre argument : « dispositif médical »

• Audika : « Seuls les appareils auditifs sont des dispositifs médicaux qui permettent de traiter une perte auditive. (…) » 

Unisson : « Selon le code de la Santé publique, un amplificateur de sons n’est pas considéré comme faisant partie de la famille des dispositifs médicaux. »

Encore une fois et toujours par souci de clarté, revenons-en aux fondamentaux : que dit la Loi ?

L’Agence Nationale de Sécurité du Médicament et des produits de Santé (ANSM), précise que « la correction d’une déficience auditive est une finalité médicale. Les appareils ayant ce type de finalité sont donc classés dans la catégorie des dispositifs médicaux et nécessitent par conséquent d’être marqués CE. Tout autre matériel ne revendiquant pas de finalité médicale ne relève pas des dispositifs médicaux. Aucune ambigüité sur la notice d’utilisation ou les matériels promotionnels ne doit alors laisser penser que cet appareil est destiné à des personnes souffrant d’une déficience auditive, aussi légère soit-elle » 

Donc, dans les faits : un appareil auditif disposant de la norme CE doit être nommé « dispositif médical » et un appareil auditif ne disposant pas de la norme CE ne doit pas être nommé « dispositif médical ». C’est aussi simple que cela.

De nombreuses aides auditives préréglées de qualité (Orison de Seriniti, Octave de Sonalto, Audibest by Louis d’EvoluPharm) disposent de la norme CE. Au regard de la Loi, elles sont donc des dispositifs médicaux. Leur finalité est, d’ailleurs, d’apporter un confort d’écoute aux pertes auditives légères à modérées, liées au vieillissement naturel de l’oreille, c’est à dire la presbyacousie.

On note une exception liée à une stratégie de marque : l’appareil auditif Orison, de Seriniti, dispose de la norme CE mais, pourtant, la société continue de préciser que l’appareil n’est pas un dispositif médical (nous en parlions dans cet article). Pourquoi ? Principalement pour dédramatiser l’appareillage auditif, car le produit n’a pas de velléités d’appareiller les handicaps profonds et que la marque ne souhaite pas que ces utilisateurs assimilent son produit à « une prothèse » mais « au gadget que les moins de 50 ans vont vous envier »Un positionnement difficilement tenable pour des audioprothésistes qui vantent les mérites d’un contour d’oreille couleur chair à des personnes de 50 ans, mais un positionnement parfaitement compris et encensés par de nombreux français.

D’autre part, une perte auditive ne se traite pas (merci Audika de nous permettre également de rebondir sur ce point), mais se compense ou se corrige par l’amplification des sons. Utiliser les bons mots permet aux personnes de mieux comprendre que les deux types d’appareils auditifs, qu’ils soient préréglés ou sur-mesure, sont des amplificateurs de sons (on en parlait ici). En effet, la presbyacousie est le résultat naturel du vieillissement de l’oreille et de la destruction des cellules ciliées. À ce jour, aucune technologie (malheureusement) ne permet la régénération des cellules ciliées de l’oreille. Ainsi, la seule solution restante pour apporter un confort d’écoute est… d’amplifier les sons sur des fréquences spécifiques.

Nous admettons volontiers qu’il peut être difficile d’expliquer aux personnes parfois gênées pour regarder la télévision que leur seule solution est de dépenser 3 000€ dans un amplificateur de sons, mais il serait plus honnête d’adapter l’offre que d’écrire des non-sens voire de dénigrer des marques qui, elles, n’ont pas cette audace et vendent leurs produits au juste prix.

Dernier registre : la peur

Après la désinformation méthodique, on entre habilement sur le registre de la peur « attention, vous allez aggraver votre cas »

• Audika : « Le choix d’un assistant d’écoute comme substitut à une aide auditive peut entrainer plus de dommages à votre audition »

Ce qui est malheureux à dire c’est que si ce genre d’arguments « passe » auprès du consommateur, c’est parce qu’il n’est pas correctement informé et qu’en continuant à se servir de ce genre d’arguments pour vendre des amplificateurs de sons à 3 000€, on continue de ne pas vouloir l’informer. C’est un cercle vicieux qui fait le jeu d’une minorité mais certainement pas d’une majorité de français dans le besoin.

Posons d’emblée une réalité : ce qui abîme l’oreille, c’est les traumatismes sonores, pressionnels ou sonores et pressionnels cumulés. L’oreille n’est jamais au repos : casque audio, musique trop forte, concerts, boites de nuits, discothèques, pétards, feu d’artifice, vie à proximité d’un aéroport, d’un carrefour urbain, en centre ville, risques sonores dans le cadre professionnel, bricolage à la maison, certains loisirs (moto, tirs, plongée bouteille ou en apnée, sports de combats avec gifle sur le pavillon) agressent l’oreille et contribuent à accélérer son vieillissement.

Lorsque la gêne auditive est là, la seule solution qui reste pour retrouver un confort d’écoute est de s’appareiller. Les appareils auditifs préréglés, dont la courbe d’amplification est spécialement conçue pour des pertes auditives presbyacousiques, est limitée dans son gain (jusqu’à 35dB max.). Cela signifie que l’amplification de l’appareil permet simplement à la personne de retrouver un niveau d’audition qui ne nécessite pas d’appareillage auditif. Nous tâchons de l’illustrer sur le schéma suivant qui représente la courbe audiométrique typique d’une perte auditive presbyacousique (cette courbe est similaire chez tout le monde, c’est pour cette raison également que l’amplification peut être préréglée : encore une fois, nous ne sommes pas dans le cas d’audiogrammes atypiques).

Il nous semble avoir fait le tour des arguments énoncés, par les structures traditionnelles, contre l’appareillage auditif préréglé. Nous espérons avoir su vous apporter des éléments d’informations qui vous permettront d’agir de manière éclairée. N’hésitez pas à jetez un oeil (même les deux!) sur nos articles précédents, qui viennent apporter d’autres éléments d’informations à celui-ci.

Pour en découvrir plus :